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Biographie                                                                                                   

Discographie                                                                      

Production liFe liVe depuis 2003

Label Ici d'Ailleurs - Tourneur Soyouz - Promotion Jean-Philippe Béraud

Autant le dire tout de suite, un album comme ça, le cinquième de Mendelson, on n'en croise pas tous les jours. Ni toutes les semaines. Ni tous les mois d'ailleurs. Non, en France, un album pareil, on en croise un tous les combien ? Tous les dix ans ? Tous les quinze ans peut-être ? Il n'y a plus rien de Léo Ferré, Play Blessures de Bashung et Gainsbourg... La même surprise. Le même choc. Et la même certitude d'avoir trouvé un compagnon sûr pour les années à venir. Oui, on écoutera encore ces onze chansons en 2030 comme on écoute encore Comme à la radio, comme on écoute encore Les Marquises. C'est rare de sentir passer le courant d'air frais (ici glacial) de la postérité... C'est bien le cas sur ce triple album impressionnant. Bien sûr on aurait pu s'y attendre après la réussite de Personne Ne Le Fera Pour Nous, il y a cinq ans déjà. On aurait pu s'en douter après quinze ans d'existence au parcours sans faute. Pour ceux qui ne connaîtraient pas encore, Mendelson possède un statut bien particulier au sein de la scène rock française. Bien peu d'artistes peuvent se targuer de rencontrer à la fois un vrai public et d'enthousiasmer la critique en proposant une musique aussi intransigeante, intègre et à contre-courant. Leur précédent disque, déjà un pari en soi puisqu'il s'agissait d'un double album sorti en autoproduction totale, réunissait des morceaux oscillant allègrement entre une et onze minutes. Aujourd'hui, Mendelson décide d'aller encore plus loin avec rien de moins que trois disques réunis dans ce coffret inclassable : un triple album virulent, un véritable pavé jusqu'au-boutiste, exigeant à l'extrême, d'une justesse, d'une force et d'un aplomb inouïs qui font de ce cinquième album un objet totalement unique.Depuis les premiers mots de « La Force quotidienne du mal » jusqu'au dernier message de « Je serais absent », de l'humour noir du « Jour Où » en passant par la lente noyade des « Heures », (54 minutes 30 au compteur, la plus longue chanson de l'histoire du rock ?), on est frappé, sonné, secoué, lessivé. Oubliés la durée, la « pop », la chanson, les formats, tout ce qu'on croit savoir sur ce qui se fait... On plonge. En apnée. On ne ressort pas indemne d'une telle immersion : eaux polluées, toxiques, radioactives. De la poésie de fin du monde d'« Il n'y a pas d'autre rêve » à la dévastation discrète de « Ville Nouvelle », du cauchemar politique de l'« Échelle sociale » à la radiographie rayons X d'« Une Seconde Vie », on est essoré, battu, ahuri, dans les cordes, KO. Assauts bruitistes, explorations lancinantes, musiques sourdes, comme en perte d'équilibre, on n'est plus dans la chanson, on est aussi très loin du rock français, on est ailleurs, dans une zone non encore explorée, en terrain inconnu.Déboussolé. Et toujours ces mots qui tapent et qui font mal. Attention, cet album n'est pas à mettre entre toutes les mains : « Explicit Lyrics », comme ils disent, âmes sensibles s'abstenir ! Bouaziz est un auteur qui laisse des marques, comme des bleus, des traces, comme des cicatrices. Bouaziz est un grand auteur, on le savait, on ne le connaissait pas encore si dur, cruel, sans pitié. Pour preuve, « Une Seconde Vie », où l'œil et le scalpel n'ont jamais été aussi affûtés et le résultat aussi sanglant. Pour preuve, la longue descente aux enfers des « Heures ». Là, c'est sûr, il n'y a pas de précédent. Il n'y aura probablement pas de successeurs. C'est un point limite. Comme le travelling dans Week-end, ou la fin de La Horde sauvage.Sur « Les Heures », et tout le long de ces trois disques, Mendelson fait tout simplement et magistralement quelque chose qui n'existait pas. Mais quel groupe aussi ! Bouaziz en tête, guitariste et chanteur, mais aussi bien sûr Pierre-Yves Louis, le guitariste, bassiste, pilier de la formation, Charlie O., pianiste et organiste, Jean-Michel Pirès et Sylvain Joasson, les deux batteurs comme possédés et qui se taillent la part du lion. Car ce qu'on sent ici, c'est bien un point de non-retour. Une sorte de Metal Machine Music avec des textes. Leur Pornography à eux, ou leur Tender Prey (les Mendelson ont, c'est vrai, comme un faux air de Bad Seeds). Ou un Metal Box sans la révolution – la révolution est morte, « L'Échelle sociale » nous le martèle impitoyablement. Metal Machine Music, Metal Box, il y a définitivement quelque chose de métallique dans cette musique.Quelque chose de dur, de net et de tranchant. Comme une belle porte en métal sur laquelle on reviendrait se taper la tête... Ce son, à mi-chemin entre Einstürzende Neubauten et le Dylan produit par Lanois (Stéphane Blaess à la prise de son et au mixage) : un son noir et blanc, White Light/White Heat, et froid et chaud, jamais tiède. Pas de robinet mélangeur ici. Pas de filtre. Pas d'adoucissant. La superposition des extrêmes, la voix qui constate, imperturbable, qui contemple, et les guitares qui assassinent. À l'arrivée ? Onze textes fracassants, un grand groupe imparable, une voix unique pour un grand, grand disque, dans tous les sens du terme, et certainement leur meilleur à ce jour. Leur meilleur album à ce jour ou leur meilleur album point final ? On voit mal où ils pourraient bien aller après ça. À moins... À moins que Mendelson ne se condamne à la lumière.

 

STAN CUESTA, journaliste (Rolling Stone, Mojo, Rock & Folk...) et écrivain (Jeff Buckley, Nirvana, Léo Ferré...)

 Mendelson 

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